Bronchiolite à VRS et risque de respiration sifflante et de sensibilisation allergique au cours de la première année de vie

Discussion

Dans la présente étude, les enfants hospitalisés pour bronchiolite à VRS ont présenté un taux significativement plus élevé de respiration sifflante récurrente et de sensibilisation allergique quelques mois seulement après l’infection à VRS. Quarante-deux enfants atteints de bronchiolite à VRS ont été suivis pendant le premier mois de leur vie et comparés à 84 enfants témoins. Les enfants index souffraient d’une infection VRS sévère nécessitant une hospitalisation. Ce groupe d’enfants ne comprend habituellement que ∼1% de tous les enfants infectés par le VRS 21. Comme 35 % des enfants témoins présentant des IgG anti-VRS positives, la plupart des enfants ont souffert d’une infection bénigne des voies respiratoires supérieures après un contact avec le VRS. Les deux groupes d’étude différaient par le nombre de frères et sœurs et le tabagisme dans la famille. Ces deux facteurs peuvent prédisposer à la bronchiolite à VRS. Le frère ou la sœur aîné(e) d’un nourrisson est le plus susceptible d’introduire le virus dans la famille 22, et le nombre de personnes partageant la chambre a été identifié comme un facteur de risque de bronchiolite à VRS 23. De la même manière, le risque d’infection par le VRS est accru chez les enfants fréquentant les crèches 23. Les garderies n’étant pas institutionnalisées dans l’ouest de l’Allemagne, ce point n’a pas été évalué dans cette étude. Le tabagisme 6, 8, 9, en particulier le tabagisme prénatal de la mère 24, est un facteur prédisposant connu pour la bronchiolite à VRS. Le tabagisme maternel pendant la grossesse est un déterminant important de la fonction pulmonaire peu après la naissance, ce qui peut expliquer le lien étroit entre l’exposition à la fumée in utero et le risque ultérieur de maladie des voies respiratoires inférieures 25.

La question principale de l’étude était cependant de savoir si la bronchiolite à VRS présente un risque de respiration sifflante et de sensibilisation allergique ultérieures. Une analyse multivariée sur l’ensemble du groupe de 126 enfants a montré que la bronchiolite à VRS était le facteur de risque le plus important pour la respiration sifflante et les sifflements récurrents. Ce facteur était suivi par le tabagisme pendant la grossesse pour les sifflements et les sifflements récurrents, et par le sexe masculin pour les sifflements. À cet égard, la présente étude confirme le résultat de nombreuses autres études 4-13. De même, le tabagisme dans la famille 6, 8, 9, et en particulier le tabagisme pendant la grossesse 24, ont été précédemment identifiés comme des facteurs de risque de respiration sifflante. En outre, le sexe masculin a été identifié comme un facteur de risque de respiration sifflante. On a constaté que le tabagisme et le sexe masculin prédisposaient à une diminution du débit expiratoire maximal au cours de la première année de vie 24. Dans une étude prospective, des niveaux inférieurs de la fonction pulmonaire ont été observés avant le développement de toute maladie des voies respiratoires inférieures chez les enfants présentant une respiration sifflante récurrente 26. Ainsi, la bronchiolite sévère à VRS et les sifflements récurrents peuvent être limités aux enfants ayant des voies respiratoires étroites et un risque plus élevé de sifflements. D’autre part, il a été démontré qu’une incidence accrue de respiration sifflante après une infection par le VRS n’est pas seulement limitée aux enfants atteints de bronchiolite sévère à VRS, mais aussi aux enfants atteints d’une maladie légère ne nécessitant pas d’hospitalisation 15, 16. On ne peut donc pas exclure que l’infection par le VRS induise activement une hyperréactivité bronchique. Un mécanisme possible pour l’induction de l’hyperréactivité pourrait être l’induction d’allergies.

Dans la présente étude, les enfants hospitalisés pour une bronchiolite à VRS présentaient un taux significativement plus élevé de sensibilisation allergique quelques mois seulement après une bronchiolite à VRS. La bronchiolite à VRS était le facteur de risque le plus important pour la sensibilisation. Les autres facteurs de risque étaient le sexe masculin et le tabagisme de la mère. Ces facteurs de risque ont été identifiés précédemment dans quelques 27, mais pas dans les 28 études. Il est possible que ces facteurs de risque supplémentaires puissent prédisposer à une immunmodulation médiée par le VRS et qu’ils n’aient donc pas été identifiés dans d’autres études portant sur les facteurs de risque d’allergie en général 29. Les sensibilisations trouvées dans cette étude étaient principalement dirigées vers des antigènes alimentaires. La seule étude qui s’est penchée sur la sensibilisation des enfants atteints de bronchiolite due au VRS à l’âge de 1 an n’a pas décrit de différence entre les enfants avec et sans bronchiolite à ce stade précoce 6. En ce qui concerne les allergènes alimentaires, seul le blanc d’œuf a été testé. Dans l’étude actuelle, on a utilisé un test multiantigène in vitro sensible 18 qui détecte, en plus du blanc d’œuf de poule, la sensibilisation à cinq autres allergènes alimentaires courants. Même si la valeur diagnostique pourrait être plus élevée si la sensibilisation aux aliments était détectée par des tests spécifiques à un seul allergène ou par des tests cutanés contre des allergènes communs 19, les résultats de cette étude éclairent les mécanismes de la sensibilisation allergique induite par le VRS. La prédominance de la sensibilisation alimentaire chez les nourrissons après une bronchiolite à VRS est cohérente avec l’idée que la bronchiolite à VRS peut accélérer le taux de sensibilisation. Les réponses IgE au cours des premiers mois de la vie sont généralement dirigées vers les protéines alimentaires 29. Les enfants souffrant d’allergies alimentaires dans la petite enfance sont enclins à se sensibiliser aux allergènes environnementaux entre leur premier et leur dixième anniversaire 30. Ainsi, le taux accru de sensibilisation à l’antigène alimentaire trouvé dans cette étude à l’âge d’un an peut prédisposer à un taux plus élevé de sensibilisation aux allergènes inhalants à des moments ultérieurs, comme décrit dans d’autres études d’enfants atteints de bronchiolite à VRS 6-8.

Le concept selon lequel la bronchiolite à VRS accélère la sensibilisation allergique est également soutenu par le fait que le risque relatif de sensibilisation était aussi élevé que 20.66 dans cette étude à l’âge de 1 an, alors que chez les enfants examinés par Sigurs et ses collaborateurs 6, 7, il était de 3,6 à l’âge de 3 ans et de 2,4 à 7,5 ans. Dans ces études, l’influence décroissante de la bronchiolite à VRS était due à une augmentation des sensibilisations allergiques dans le groupe témoin. En extrapolant les données actuelles à des moments ultérieurs, on peut supposer que le taux de sensibilisation du groupe témoin augmentera encore pour atteindre un niveau de 25 %, comme on l’observe dans la population générale des pays développés 31, et qu’il se stabilisera donc avec le groupe VRS. Si cela est vrai, il n’est pas surprenant qu’un certain nombre d’études rétrospectives portant sur des enfants plus âgés n’aient pu détecter aucune influence du VRS sur la sensibilisation allergique 4, 5, 11-13.

Le taux élevé de sensibilisation aux aliments, mais pas aux allergènes inhalés, dans cette étude pourrait également éclairer la pathophysiologie de l’augmentation de la sensibilisation allergique associée au VRS. La réaction aux antigènes alimentaires est susceptible d’être soit systémique, soit confinée à l’intestin 32 plutôt qu’au système respiratoire. Conformément à d’autres études 6, 7, 16, les auteurs ont constaté que seule la bronchiolite sévère à VRS, et non une infection légère à VRS, augmentait le risque de sensibilisation. En cas de bronchiolite sévère, il a été démontré que le VRS se propageait en dehors des voies respiratoires 33. De plus, une modulation de la réponse immunitaire systémique a été démontrée par plusieurs auteurs 34-36. Il est donc concevable qu’une infection sévère par le VRS puisse être capable de moduler la réponse immunitaire dans des systèmes organiques autres que les voies respiratoires. En outre, la modulation immunitaire induite par le virus est la plus importante au cours de l’infection aiguë et des semaines qui suivent, comme cela a été démontré dans le cas d’une infection murine par le VRS 37, 38 ou d’une infection humaine par la rougeole 39. Il est donc probable que son effet sur la sensibilisation allergique se manifeste le plus clairement peu après l’infection.

La prédominance de la sensibilisation aux aliments plutôt qu’aux allergènes inhalés rend très improbable une relation directe entre la sensibilisation et les symptômes d’obstruction respiratoire. Cela correspond à l’observation rapportée par Stein et al. 16 selon laquelle une augmentation de la maladie obstructive bronchique est constatée chez les enfants atteints d’une infection légère par le VRS ne nécessitant pas d’hospitalisation et que ce taux accru de maladie obstructive n’est pas lié à la sensibilisation allergique.

Bien que l’étude actuelle puisse aider à clarifier l’association entre l’infection par le virus respiratoire syncytial, la respiration sifflante récurrente et la sensibilisation allergique, les limites de l’étude doivent être précisées. Les groupes étudiés n’ont pas été appariés en fonction du tabagisme dans la famille et du nombre de frères et sœurs. Seuls les enfants atteints de bronchiolite sévère, mais pas ceux souffrant d’infections plus légères des voies respiratoires inférieures, ont été comparés à des témoins sains. Au lieu de tests pour un seul allergène, on a utilisé un test multiallergène moins sensible, et les enfants n’ont été suivis que pendant la première année. Ces problèmes doivent être abordés dans les études futures.

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