Pancréatite auto-immune : A Surgical Dilemma | Cirugía Española (English Edition)

Definition

La pancréatite auto-immune (PIA) est une maladie fibro-inflammatoire bénigne du pancréas, signalée pour la première fois en 1961 comme un cas de pancréatite lié à une hypergammaglobulinémie.1 En 1995, Yoshida et al. ont proposé le concept de PIA2. Récemment, l’Association Internationale de Pancréatologie a défini le PIA comme une forme spécifique de pancréatite qui se manifeste souvent par un ictère obstructif, parfois lié à une masse pancréatique avec des changements histologiques caractéristiques qui incluent un infiltrat lymphoplasmocytaire et une fibrose, et qui montre une excellente réponse au traitement par corticoïdes.3

Types de pancréatite auto-immune

L’analyse histopathologique du pancréas définit 2 modèles avec des caractéristiques différentielles : (1) la pancréatite sclérosante lymphoplasmocytaire (PPSL) ou PIA sans lésions épithéliales granulocytaires et (2) la pancréatite idiopathique ductocentrique (PIDC) ou PIA avec lésions épithéliales granulocytaires. Cependant, étant donné que la description histologique n’est pas toujours disponible, les termes PIA de type 1 et de type 2 ont été introduits afin de décrire les manifestations cliniques liées à la PPSL ou à la PIDC, respectivement.4

La pancréatite de type 1 est la forme prédominante dans les pays asiatiques. Elle est plus fréquente chez les hommes (3-4:1), avec un pic dans la sixième décennie de la vie ; elle peut inclure une élévation des immunoglobulines G4 (IgG4) sériques, et elle est souvent liée à une implication fibro-inflammatoire d’autres organes. La résolution des manifestations pancréatiques et extrapancréatiques avec des stéroïdes est caractéristique des patients de type 1, bien que les rechutes soient fréquentes après l’arrêt du traitement, en particulier pour les cas d’atteinte extrapancréatique.5

La pancréatite de type 2 est rapportée plus souvent en Europe et aux Etats-Unis. Elle affecte principalement des patients plus jeunes (une décennie avant le PIA de type 1), sans différence entre les sexes ; elle ne s’accompagne pas d’une élévation du taux sérique d’IgG4, n’est pas liée à une atteinte d’autres organes, et une maladie inflammatoire intestinale associée existe chez un pourcentage élevé de patients (11 %-30 %) (plus fréquemment une colite ulcéreuse qu’une maladie de Crohn). La réponse au traitement par stéroïdes est bonne et les rechutes sont rares. Étant donné que le PIA de type 2 ne présente pas de marqueurs sériques (pas d’élévation des IgG4) ni d’atteinte d’autres organes, son diagnostic définitif nécessite une analyse histologique du pancréas. Ceci explique en partie pourquoi la PIA de type 2 est diagnostiquée moins fréquemment que celle de type 1.5

Manifestations cliniques

La manifestation la plus fréquente est l’ictère obstructif causé par une masse pancréatique (jusqu’à 59% des cas) ou par l’élargissement de la paroi du canal biliaire commun.6 Elle peut également se manifester par une pancréatite aiguë unique ou récurrente ou évoluer vers une pancréatite chronique avec calcification et insuffisance pancréatique exocrine et endocrine.7 Une autre forme de présentation comprend des symptômes liés à une atteinte extrapancréatique, par exemple : tumeur lacrymale ou salivaire, toux, dyspnée due à des lésions pulmonaires ou lombalgie causée par une fibrose rétropéritonéale ou une hydronéphrose.6

Modifications histopathologiques

L’AIP présente des modifications histopathologiques bien définies dans le pancréas qui sont facilement différenciées des modifications survenant dans d’autres types de pancréatite (alcoolique ou chronique obstructive). Certains de ces types sont communs aux types 1 et 2 et d’autres sont utilisés pour différencier les deux groupes.8,9

Les résultats histopathologiques communs à la pancréatite auto-immune de type 1 et de type 2

L’infiltration lymphoplasmocytaire et le stroma cellulaire inflammatoire sont des résultats très caractéristiques de la PIA.8 L’infiltration lymphoplasmocytaire est dense et se renforce autour des canaux de taille moyenne et grande, comprimant la lumière canalaire (image canalaire en forme de fer à cheval ou d’étoile, très caractéristique de la PIA), ce qui diffère de la dilatation canalaire (caractéristique de la pancréatite chronique d’une autre origine). L’infiltration lymphoplasmocytaire s’étend de façon diffuse dans le parenchyme pancréatique, où elle s’accompagne d’une fibrose et d’une atrophie acinaire et conduit à un stroma cellulaire inflammatoire, avec des lymphocytes abondants, des plasmocytes et des zones tachées d’éosinophiles ; ces dernières sont spécifiques du PIA, mais pas des autres types de pancréatite chronique.

Résultats caractéristiques de la pancréatite auto-immune de type 1

La fibrose storiforme, la phlébite oblitérante, les follicules lymphoïdes proéminents et les plasmocytes IgG4+ sont des résultats très caractéristiques de la PIA de type 1, bien qu’on les retrouve également en plus faible proportion dans le type 2.9 La fibrose storiforme ou verticillée est un type particulier de fibrose causé par un maillage de courtes fibres de collagène entrelacées dans diverses directions et infiltrées par un composant lymphoplasmocytaire dense. Ce schéma est décrit dans 90 % des PIA de type 1 et 29 % des PIA de type 2. La phlébite oblitérante transforme l’inflammation de la veine en infiltration lymphoplasmocytaire, puis obstrue la lumière vasculaire. Bien qu’elle soit difficile à reconnaître, son identification est d’un grand intérêt car elle est un signe pathognomonique du PIA. Cette modification est décrite dans 90% des PIA de type 1 et 57% des PIA de type 2. L’existence d’agrégats et de follicules lymphoïdes proéminents dans le parenchyme et la graisse péripancréatique est un autre fait caractéristique du PIA (100% pour le type 1 et 47% pour le type 2) ; cependant, elle est également observée dans environ la moitié des cas de pancréatite chronique alcoolique et de pancréatite chronique obstructive. La détection de plasmocytes IgG4 abondants (>10 cellules/champ à haute puissance) est le détail clé pour diagnostiquer le PIA de type 1, alors que pour le PIA de type 2, les plasmocytes IgG4 n’existent pas ou sont peu nombreux (

cellules/HPF). Il est important de considérer que ces cellules peuvent également être observées dans d’autres formes de pancréatite chronique (11%-57%) et dans l’adénocarcinome du canal pancréatique (12%-47%).Résultats caractéristiques de la pancréatite auto-immune de type 2

Les lésions épithéliales granulocytaires sont pathognomoniques de la PIA de type 2.9 Ces lésions sont formées par des infiltrats de neutrophiles affectant les canaux moyens et petits, ainsi que les cellules acineuses, provoquant une destruction cellulaire et une oblitération de la lumière.

Tests d’imagerie

Pour diagnostiquer la PIA, il faut rechercher les modifications parenchymateuses et canalaires typiques, bien que, dans de nombreuses occasions, elles soient les mêmes que celles du cancer du pancréas.6 L’image typique montre un pancréas hypertrophié de forme diffuse (« pancréas en forme de saucisse ») avec une perte de lobularité. L’hypoatténuation du parenchyme dans la phase pancréatique et le rehaussement différé dans la phase veineuse sont caractéristiques en tomographie axiale informatisée (CT). La résonance magnétique (RM) montre également un élargissement caractéristique du pancréas hypointense dans les séquences potentialisées T1 par rapport à un pancréas non affecté ou par rapport à un foie hyperintense dans les séquences potentialisées T2 et un rehaussement retardé dans la phase veineuse. Un halo périphérique hypoatténué est une découverte typique de l’AIP avec un contraste CT et hypointense sur les images MR T1 et T2. Cependant, l’AIP peut aussi montrer une masse pancréatique focale, hypodense ou hypointense en TDM et en RM, respectivement ; ces cas sont les plus difficiles à diagnostiquer et à différencier du cancer du pancréas (Fig. 1). La wirsungraphie par RM ou la cholangiographie rétrograde endoscopique peuvent fournir des informations clés en termes de changements du canal. Une sténose longue, multiple ou focale est caractéristique du PIA (>1/3 de la conduite de Wirsung), le tout sans dilatation proximale.10 L’endoscopie est un autre examen de grande valeur dans le diagnostic du PIA, notamment parce qu’elle offre la possibilité d’obtenir une cytologie ou une biopsie pancréatique pour une analyse anatomopathologique.3,11,12

Fig. 1.

Images radiologiques d’un patient atteint d’une pancréatite auto-immune (PIA) liée à la jaunisse, indolore et présentant une masse pancréatique. (A) Echographie abdominale montrant une zone focale hypoéchogène dans la tête du pancréas par rapport au reste de la glande. (B) Séquence T2 potentialisée de la résonance magnétique montrant une zone focale avec une augmentation du signal dans la même région du pancréas, sans distorsion claire des contours ni élargissement de la glande. (C) Séquences cholangiographiques montrant une légère sténose focale de la taille du conduit pancréatique, qui reste perméable et ne provoque pas de dilatation proximale. (D) La zone focale du pancréas semble moins accentuée que le parenchyme adjacent dans la phase artérielle de l’analyse dynamique ; (E) montre un rehaussement plus important dans les phases retardées.

(0,15MB).

Sérologie

À l’heure actuelle, nous manquons de marqueurs sériques spécifiques pour diagnostiquer le PIA. L’élévation du taux sérique d’IgG4 est un détail caractéristique de la PIA de type 1, bien que son interprétation mérite quelques considérations en termes de sensibilité et de spécificité diagnostiques.13 En ce qui concerne la sensibilité, la PIA de type 2 ne comprend jamais d’élévation des IgG4, et un pourcentage de patients atteints de PIA de type 1 sont IgG4 négatifs.14 Sa spécificité est déterminée en grande partie par un niveau de coupure défini, et il est important de considérer que les IgG4 peuvent être élevées dans d’autres maladies pancréatiques (en particulier le cancer du pancréas et la pancréatite chronique), et dans des maladies extrapancréatiques (dermatite atopique, asthme, pemphigus, parasitose). Si les valeurs supérieures au niveau supérieur de la normale (IgG4>135mg/dl) sont considérées comme positives, la sensibilité des IgG4 est limitée (79%-93%),15,16 avec 5% des sujets témoins et 10% des patients pancréatiques15 positifs. Si la valeur seuil est fixée pour ceux qui sont supérieurs à 2 fois le niveau normal (IgG4>280mg/dl), aucun des sujets de contrôle, et seulement 1% des patients atteints de cancer du pancréas montrent des IgG4 élevées, et la spécificité du marqueur dans ces cas est de 99%.15 A ce jour, nous ne disposons pas de données épidémiologiques permettant de définir la précision diagnostique des IgG4 en Espagne, et les données de plusieurs études sont trop hétérogènes en fonction de la zone géographique (prévalence plus importante dans les pays asiatiques qu’en Europe), du niveau de seuil ou du type de PIA analysé.13 Les autres paramètres qui peuvent accompagner le PIA sont l’hypergammaglobulinémie, l’élévation des IgG, l’hyperéosinophilie ou l’existence d’anticorps antinucléaires et de facteur rhumatoïde. Bien que ces paramètres puissent aider à confirmer le diagnostic, aucun d’entre eux n’a été reconnu comme faisant partie des critères diagnostiques établis par les critères internationaux de diagnostic du PIA.3

Autres atteintes d’organes

Au total, 50 à 70 % des patients atteints du PIA de type 1 présentent d’autres atteintes d’organes dans le cadre d’une maladie systémique liée aux IgG4.3,17,18 Les manifestations extrapancréatiques peuvent précéder, se produire simultanément ou être postérieures au PIA. Le diagnostic de l’atteinte d’autres organes peut être posé à partir de l’atteinte histologique (infiltration de plasmocytes IgG4 dans le tissu affecté), de l’imagerie (sténose du canal biliaire proximal, fibrose rétropéritonéale), de l’examen clinique (augmentation des glandes salivaires) et de la réponse aux stéroïdes.18,19 De nombreux tissus peuvent être affectés ; l’atteinte de l’arbre biliaire est la plus fréquente (50 à 90 % des cas) (cholangite sclérosante liée aux IgG4), qui se manifeste généralement par un ictère obstructif. Les autres sites possibles sont les ganglions lymphatiques, les glandes salivaires et lacrymales, la glande thyroïde, le rétropéritoine, la vésicule biliaire, le foie, l’aorte, les reins et l’uretère, les seins, les poumons, le système nerveux central et la prostate. Une caractéristique partagée par les différents organes impliqués dans le contexte du syndrome associé aux IgG4 est la tendance à former des lésions tumorales ou pseudo-tumorales, des lésions histologiques similaires à celles trouvées dans le pancréas, et, bien que pas toujours, une élévation des IgG4 sériques. D’autres troubles auto-immuns (par exemple, la polyarthrite rhumatoïde, le psoriasis, le syndrome de Sjögren) ne sont pas considérés comme des troubles  » d’autres atteintes d’organes  » dans le diagnostic du PIA.19

Traitement

Le traitement vise à éliminer les symptômes et à résoudre les manifestations pancréatiques et extrapancréatiques observées dans les tests d’imagerie.20 Le traitement de choix est les corticostéroïdes, étant donné la bonne réponse à la fois pour le PIA de type 1 et de type 2, bien que la récurrence après la fin du traitement soit élevée, en particulier pour le PIA de type 1.21 Bien qu’il n’y ait pas de protocole thérapeutique standardisé, la plupart des directives recommandent la prednisone à une dose initiale de 35-40mg/jour,22 ou 0,6-1mg/kg/jour selon le consensus international pour le diagnostic du PIA,3 pendant 4 semaines, et en cas de réponse radiologique et clinique, une réduction progressive de la dose sur 3-4 mois. Certains groupes recommandent de maintenir une corticothérapie à faible dose (2,5-5mg/jour) pendant 3 ans pour le PIA de type 1, étant donné son taux élevé de rechute23. La réintroduction de corticostéroïdes ou l’instauration d’immunosuppresseurs tels que l’azathioprine, le méthotrexate, le mycophénolate et le rituximab sont des alternatives thérapeutiques utilisées en cas de rechute après l’arrêt de la corticothérapie.20,24 Les facteurs prédictifs de rechute de la sténose proximale comprennent la sténose du canal biliaire proximal et l’élévation persistante des IgG4.20 Certains patients, en particulier ceux atteints de PIA de type 2, connaissent une rémission spontanée sans traitement stéroïdien.25

Diagnostic

En 2010, l’Association internationale de pancréatologie a élaboré le Consensus international sur les critères de diagnostic (ICDC) du PIA.3 Ce document consolide les critères de diagnostic définis précédemment par plusieurs associations (japonaise, coréenne, asiatique, Mayo Clinic, Mannheim et italienne). L’ICDC établit le diagnostic de PIA en combinant un ou plusieurs des aspects suivants : (1) des résultats d’imagerie : (a) du parenchyme pancréatique (par CT ou MR), et (b) du canal pancréatique (par cholangiographie MR ou cholangiographie rétrograde endoscopique) ; (2) sérologie (IgG, IgG4, anticorps anti-nucléaires) ; (3) atteinte d’autres organes ; (4) histologie du pancréas et (5) réponse aux corticostéroïdes. Chacun de ces aspects est classé comme niveau 1 et niveau 2 en fonction de leur fiabilité diagnostique. Après application de ces critères, un diagnostic certain ou probable peut être obtenu pour le PIA de type 1 (tableaux 1 et 2) ou de type 2 (tableaux 2 et 3), bien que dans certains cas il soit impossible de distinguer les deux types (pancréatite auto-immune indéterminée, tableau 2).3

Tableau 1.

Classification des critères de diagnostic de la pancréatite auto-immune de type 1 et 2.

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Critères Niveau 1 Niveau 2
P Image du parenchyme Typique : Hypertrophie diffuse avec rehaussement différé Indéterminée (y compris atypiquea) : Élargissement focal avec rehaussement retardé
D Image canalaire Longue sténose de Wirsung (>1/3) ou multiple sans dilatation distale marquée Segment/sténose focale sans dilatation distale marquée (diamètre canalaire mm)
S Sérologie IgG4 >×2 au-dessus de la limite supérieure de la normale IgG4, × 1-2 au-dessus de la limite supérieure de la normale
OOI Autres atteintes organiques (a) ou (b)(a) Histologie (≥3 des éléments suivants) :Lymphoplasmocytaire marqué sans infiltration granulocytaireFibrose storiformeFibrose oblitérante>10 cellules IgG4-positives/HPF(b) Image (≥1 des éléments suivants):Segment biliaire proximal/sténose multiple (hilaire/hépatique) ou sténose proximale et distaleFibrose rétropéritonéale (a) ou (b)(a) Histologie. Y compris biopsie de la papille de Vater (les deux suivantes):Infiltration lymphoplasmocytaire marquée sans granulocyte10 cellules IgG4-positives/HPF(b) Preuve clinique ou radiologique (≥1 des éléments suivants) :Hypertrophie symétrique des glandes salivaires/lacrymalesEngagement rénal démontré par une radiologie rapportée en relation avec l’AIP
H Histologie du pancréas LPSP, biopsie ou résection (≥3 des éléments suivants) :Infiltrat lymphoplasmocytaire périductal sans infiltration granulocytaireFibrose oblitéranteFibrose toriforme≥ 10 cellules IgG4-positives/HPF LPSP, biopsie (≥2 des éléments suivants) :Infiltrat lymphoplasmocytaire périductal sans infiltration granulocytairePhlébite oblitéranteFibrose storiforme≥10 cellules IgG4-.cellules positives/HPF
Rt Réponse aux stéroïdes Résolution rapide confirmée par radiologie (≥2 semaines) ou amélioration marquée des manifestations pancréatiques/extrapancréatiques

HPF : Champ de haute puissance ; PIA : pancréatite auto-immune ; PPSL : pancréatite sclérosante lymphoplasmocytaire.

a

Atypique : masse de faible densité, dilatation canalaire ou atrophie pancréatique distale. Ces résultats atypiques chez un patient présentant une jaunisse obstructive sont clairement évocateurs d’un cancer du pancréas. Ces cas doivent être considérés comme un cancer du pancréas à moins qu’une forte preuve collatérale de PIA soit disponible et qu’un diagnostic exhaustif ait été réalisé pour exclure une malignité.

Tableau 2.

Classification des critères de diagnostic de la pancréatite auto-immune de type 2 de niveau 1 et 2.

Critères Niveau 1 Niveau 2
P Image du parenchyme Typique : Hypertrophie diffuse avec rehaussement différé Indéterminée (y compris atypiquea) : Élargissement focal avec rehaussement retardé
D Image canalaire Longue sténose de Wirsung (>1/3) ou multiple sans dilatation distale marquée Segment/sténose focale sans dilatation distale marquée. (diamètre canalaire mm)
OOI Autres atteintes d’organes Maladie inflammatoire de l’intestin
H Histologie du pancréas (biopsie/résection) IDCP : (2 des éléments suivants) :Infiltration granulocytaire de la paroi canalaire avec ou sans inflammation acineuse granulocytairePeu ou pas de cellules IgG4-positives (0-10 cellules/HPF 2 des éléments suivants :Infiltration acineuse granulocytaire et lymphoplasmocytairePeu ou pas de cellules positives aux IgG4-.cellules positives (0-10 cellules/HPF)
Rt Réponse aux stéroïdes Résolution rapide confirmée par radiologie (≤2 semaines) ou amélioration marquée des manifestations pancréatiques/extrapancréatiques

HPF : champ de haute puissance ; PIDC : pancréatite canaliculaire idiopathique.

a

Atypique : masse de faible densité, dilatation canalaire ou atrophie pancréatique distale. Ces résultats atypiques chez un patient présentant un ictère obstructif sont clairement évocateurs d’un cancer du pancréas. Ces cas doivent être considérés comme un cancer du pancréas à moins qu’une forte preuve collatérale de PIA soit disponible et qu’un diagnostic exhaustif ait été réalisé pour exclure une malignité.

Tableau 3.

Diagnostic définitif, probable ou indéterminé de la pancréatite auto-immune de type 1 et de type 2.

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Diagnostic Base de diagnostic Preuve par imagerie Preuve collatérale
Définition de la PIA de type 1 Histologie. Typique/indéterminé Confirmation histologique du PPSL (niveau 1H)
Image Typique indéterminé Tout niveau non D 1 ou 2Plus de 2 niveaux 1 (+niveau 2Da)
Réponse aux stéroïdes Inndéterminée Niveau 1 S/OOI+Rt ou niveau 1D+niveau 2S/OOI/H+Rt
Probable type 1 AIP Indéterminé Niveau 2S/OOI/H+Rt
Défini type 2 AIP Typique/indéterminé Confirmation histologique d’une IDCP (niveau 1H) ou d’une maladie inflammatoire de l’intestin+niveau 2H+Rt
Probable type 2 AIP Typique/indéterminé Niveau 2H/Maladie inflammatoire de l’intestin+Rt
Probable AIP de type 2 Typique/indéterminé D1/2+Rt (uniquement les cas D1/2)

OOI : autres atteintes d’organes ; D : image canalaire ; H : histologie du pancréas ; PIA : pancréatite auto-immune ; PIDC : pancréatite canalaire-centrique idiopathique ; PPSL : pancréatite sclérosante lymphoplasmocytaire ; Rt : réponse aux corticoïdes ; S : sérologie.

a

Bien que le niveau D (canalaire) ait été défini comme niveau 2, dans ce cas, le niveau 2D a une valeur de niveau 1.

Expérience chirurgicale dans la pancréatite auto-immune : Lessons to be Learned

La prévalence de la PIA dans les pays occidentaux et orientaux est inconnue. Au Japon, on estime une prévalence de 0,82 pour 100000 habitants, et 6% des patients atteints de pancréatite chronique aux Etats-Unis seront atteints de PIA, ce qui place le PIA parmi les maladies rares (celles dont la prévalence est

000 habitants).26,27 Cependant, malgré sa rareté, un diagnostic différentiel du PIA avec une néoplasie pancréatique ou biliaire est fondamental, étant donné que son pronostic et le traitement proposé sont radicalement différents. La présentation clinique et radiologique, souvent impossible à distinguer d’une néoplasie biliopancréatique, et l’absence d’un marqueur définitif conduisent à une sous-évaluation diagnostique de cette maladie, ce qui entraîne des résections pancréatiques inutiles dans un nombre considérable de cas. Les études de séries de cas chirurgicaux publiées jusqu’à présent ont une grande valeur scientifique, puisqu’elles constituent un point de départ pour reconnaître et décrire les lésions histologiques du PIA, démontrent la difficulté de son diagnostic et nous montrent la nécessité d’avoir un plus grand niveau de sensibilisation et de connaissance de l’existence de cette maladie pour pouvoir atteindre son diagnostic avant d’indiquer la chirurgie (Tableau 4).28-37

Tableau 4.

Série de cas chirurgicaux de pancréatite auto-immune.

Étude Période d’étude Type d’atteinte Diagnostic histologique de l’AIP/résections pancréatiques ou hépatobiliaires (%)
Weber et al, 2003 (Memorial Sloan-Kettering Cancer Centre)28 1985-2001 Pancréatique 31/1287 (2,4)
Hardacre et al, 2003 (Johns Hopkins Hospital)29 1992-2002 Pancréatique 37/1648 (2,3)
Abraham et al, 2003 (Mayo Clinic)30 1999-2001 Pancréatique 11/442 (2,5)
Corvera et al, 2005 (Memorial Sloan-Kettering Cancer Centre)31 1992-2003 Biliaire 2/275 (0,7)
Schnelldorfer et al, 2007 (Université de Caroline du Sud)32 1995-2002 Pancréatique et biliaire 8/161 (5)
Ghazale et al, 2008 (Mayo Clinic)33 NS Pancréatique 18/NS
Erdogan et al, 2008 (Université d’Amsterdam)34 1984-2005 Biliaire 15/185 (8)
Cheung et al, 2008 (Hong Kong)35 2003-2006 Biliaire 5/NS
Clark et al, 2013 (Multicentre, USA)36 1986-2011 Pancréatique 74/NS
Miura et al, 2013 (Université de Tokyo)37 2006-2010 Pancréatique 13/NS

Ratio de patients diagnostiqués avec un PIA après analyse histologique de l’échantillon pour les patients ayant subi une chirurgie en raison d’une suspicion de néoplasie biliopancréatique.

NS : non spécifié ; PIA : pancréatite auto-immune.

La manifestation clinique la plus fréquente du PIA, en particulier du type 1, est un ictère obstructif indolore lié à une masse pancréatique (68%-84%),28,29,38 et les canaux biliaires sont le site d’atteinte extrapancréatique le plus fréquent6,39. Dans de nombreux cas, une lésion de masse de la tête du pancréas et une atteinte du canal biliaire distal causées par le PIA produisent des symptômes correspondant au cancer du pancréas. En cas d’atteinte biliaire proximale, un cholangiocarcinome hilaire peut être suspecté.34

Trois grandes séries de cas chirurgicaux ont été publiées décrivant des cas de PIA chez un grand nombre de patients ayant subi une résection pancréatique. Il s’agit de : Weber et al. au Memorial Sloan-Kettering Cancer Centre de New York, Hardacre et al. au Johns Hopkins Hospital de Baltimore, et Abraham et al. à la Mayo Clinic du Minnesota (tableau 4).28-30 L’étude de Weber comprend 1287 résections pancréatiques effectuées de 1985 à 2001.28 Un total de 159 (12%) d’entre eux présentaient une maladie bénigne lors de l’évaluation anatomopathologique, dont 29 étaient des pancréatites auto-immunes, et 2 patients souffraient de pseudo-tumeurs liées au PIA qui ont été considérées comme non résécables. Ces 31 patients représentent 2,7% du total des patients opérés et 19,5% des patients opérés présentant une maladie bénigne. L’âge moyen de ces 31 patients était de 62 ans ; 68% étaient des hommes ; 68% avaient une jaunisse, 29% des douleurs abdominales et 19% une « maladie liée à une auto-immune ». Les résections étaient les suivantes : 23 duodénopancréatectomies (DP), 4 pancréatectomies distales et 2 pancréatectomies totales. Deux patients étaient non résécables en raison d’une infiltration de l’artère mésentérique supérieure et de la veine porte. Huit des 29 patients (28 %) ont connu une  » rechute  » de la maladie et 3 des 4 patients ayant subi une résection distale ont développé un ictère ultérieur. Quatre des 23 patients atteints de DP ont développé un ictère après l’excision (3 résultant d’une sténose intrahépatique multiple et un d’une anastomose bilio-entérique), et un des 23 CDP a développé une pancréatite due à une sténose du canal pancréatique28. Cette étude met en évidence la difficulté de parvenir à un diagnostic correct du PIA avant la chirurgie et la façon dont un tiers des patients ont connu une rechute de la maladie après l’excision ; cela souligne la nécessité d’un traitement post-chirurgical de ces patients.

Un total de 1648 cas de résection pancréatique duodénale à l’hôpital Johns Hopkins réalisés entre 1992 et 2002 ont été examinés.29 Parmi ceux-ci, 176 (11%) résultaient d’une pancréatite chronique, dont 37 cas (21%) étaient liés au PIA. Tous les patients atteints de PIA ont été suspectés de cancer du pancréas avant la chirurgie et tous étaient résécables. L’âge moyen de ces patients était de 62 ans ; 64 % étaient des hommes ; 84 % avaient une jaunisse, 54 % des douleurs abdominales et 34 % une maladie auto-immune. Le type de chirurgie était 26 DP préservant le pylore et 11 DP classiques.29

Dans leur revue, Abraham et al, à la Mayo Clinic, ont évalué 442 échantillons de CDP réalisés entre 1999 et 2001.30 Cette série de cas a identifié 47 échantillons négatifs pour la maladie néoplasique (10,6%), et parmi ceux-ci, 40 patients ont été opérés en raison d’une suspicion de malignité (9,2%). Les caractéristiques cliniques qui ont fait suspecter une malignité dans ces 40 cas étaient des lésions de masse pancréatique dans 67 % des cas, un ictère obstructif dans 50 % des cas, une sténose des voies biliaires dans 40 % des cas et une cytologie positive dans 12 % des cas. Le diagnostic pathologique définitif de ces 40 patients était le PIA chez 11 (27,5 %), la pancréatite chronique liée à l’alcool chez 8 (20 %), la pancréatite liée à une lithiase biliaire chez 4 (10 %), la pancréatite chronique d’étiologie indéterminée chez 6 (15 %), la sténose isolée des voies biliaires d’étiologie indéterminée chez 4 patients (10 %) et la cholangite sclérosante chez 3 patients (7,5 %). Cette étude a révélé que le nombre de PDC provenant d’une maladie bénigne du pancréas est important (9,2%) et que le PIA est le diagnostic le plus fréquent parmi eux.30

L’expérience chirurgicale accumulée chez les patients atteints de PIA a montré les difficultés techniques liées à la chirurgie pancréatique pour ces patients, que le chirurgien doit prendre en compte pour éviter les problèmes de lésions vasculaires et de saignement. Les patients atteints de PIA ont besoin d’un temps de chirurgie plus long, et ils subissent une plus grande perte de sang probablement causée par une dissection plus difficile de l’échantillon pour la séparation des vaisseaux viscéraux en raison de l’inflammation péripancréatique et de la défiguration des plans dans le tissu normal.28-Récemment, Clark et al. ont publié un rapport sur l’expérience chirurgicale à court et à long terme d’une étude multicentrique incluant des patients atteints de PIA à la Mayo Clinic (sites du Minnesota et de Floride) et au Massachusetts General Hospital de 1986 à 2011.36 Au total, 74 patients atteints de PIA ont été recrutés pour cette étude, diagnostiqués par histologie dans des échantillons pancréatiques collectés après résection chirurgicale. L’âge moyen des patients était de 60 ans ; 69 % étaient des hommes, et l’indication chirurgicale était une suspicion de cancer chez 80 % d’entre eux. Le sous-type de PIA a été déterminé chez 63 (85%) des patients ; au total, 34 étaient de type 1 et 29 de type 2. Les interventions chirurgicales réalisées étaient les suivantes : DP chez 56 patients (75%), pancréatectomie distale avec splénectomie chez 10 patients (14%), sans splénectomie chez 5 patients (7%), et pancréatectomie totale chez 3 patients (4%). La cause la plus fréquente de la chirurgie était la suspicion de néoplasie (n=59, 80%). Cette étude décrit des difficultés chirurgicales chez 34 patients (46%). Une réparation/reconstruction vasculaire a été nécessaire chez 15 (20%) des patients ; la durée moyenne (intervalle interquartile) de l’opération était de 360min (325-415min), et 19 (26%) des patients ont eu besoin d’une transfusion sanguine dans les 24 premières heures postopératoires. La perte de sang estimée était de 600ml (300-1000ml), et 4% ont dû être réopérés dans les 30 premiers jours (3 patients). Dix (14%) patients ont connu des complications majeures ; il y a eu un décès périopératoire (1%), et 2 patients ont eu des fistules pancréatiques cliniquement significatives (grade ISGPF B/C). Au total, 17% des patients ont connu une récidive des symptômes du PIA sans que cela n’affecte significativement leur survie globale. Ces études ont révélé les difficultés techniques peropératoires et le défi chirurgical supplémentaire que représente cette affection.

Commentaire final

Malgré les connaissances croissantes sur le PIA rassemblées ces dernières années, le PIA reste une maladie au diagnostic tardif après une résection pancréatique. Une étude rétrospective menée par Learn et al. dans une série de cas impliquant 68 patients diagnostiqués avec le PIA montre que 53 d’entre eux ont subi une résection pancréatique comme première option thérapeutique, et 15 d’entre eux n’ont pas subi de chirurgie. Par rapport aux patients qui n’ont pas été opérés, le groupe de patients qui l’ont été a montré un taux plus faible d’hypertrophie pancréatique diffuse (80 % contre 8 %, respectivement) et une quantité plus faible d’analyse des IgG4 sériques avant le traitement (100 % contre 11 %). La cytologie de ponction a été interprétée à tort comme un adénocarcinome chez 12 patients, dont 10 ont été opérés. Cette étude conclut que les facteurs conduisant à une résection pancréatique chez les patients atteints de PIA en raison d’un diagnostic incorrect comprennent : la difficulté à reconnaître les détails spécifiques à la maladie, tels que les manifestations radiologiques caractéristiques, et les faux positifs de la cytologie endoscopique (33). Le principal facteur limitant de ce test est le faible volume de biopsie qui peut être prélevé ; par conséquent, à moins qu’il ne soit effectué par des endoscopistes expérimentés, il ne peut généralement pas être utilisé pour le diagnostic définitif du PIA.41,42

A l’heure actuelle, il est impératif de développer des marqueurs sériques ou des tests d’imagerie capables d’identifier facilement et précisément la maladie ; sinon, nous devons nous concentrer sur le développement de stratégies pour essayer de fournir un diagnostic différentiel avec le cancer du pancréas en combinant des éléments de diagnostic.43-Dans la plupart des cas, la preuve d’une masse hypointense de la tête du pancréas chez un patient atteint d’une jaunisse obstructive ne laissera aucun doute quant au diagnostic du cancer du pancréas. Cependant, il est important de reconsidérer le diagnostic si des résultats atypiques apparaissent, tels qu’une évolution clinique atypique, une atteinte d’autres organes, l’existence d’un halo périphérique dans la masse pancréatique, l’absence de dilatation canalaire présénotique ou l’élévation du taux sérique d’IgG4 lors du diagnostic. L’un des éléments diagnostiques reconnus par la CIDC est la réponse aux corticostéroïdes. C’est un outil qui peut être considéré lorsque le cancer du pancréas a été exclu : par exemple, avec des masses pancréatiques atypiques montrées par l’imagerie radiologique et une cytologie négative pour les cellules malignes. Dans ces cas, un traitement initial de 2 semaines est recommandé, puis une réévaluation des symptômes du patient et des manifestations radiologiques.47 Il faut mentionner les preuves rapportées sur les cas d’adénocarcinome pancréatique chez les patients atteints de PIA,48,49 ainsi que sur la néoplasie mucineuse papillaire intraductale,50,51 qui soulignent la nécessité de fournir un suivi étroit pour ces patients.

Conflit d’intérêts

Les auteurs déclarent n’avoir aucun conflit d’intérêts.

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